Présentations du château de Brecourt
La seigneurie de Brécourt appartenait à la famille Jubert depuis 1531. C’est à cette date qu’Henri Jubert, fils de Guillaume Jubert et de Catherine du Bois d’Ennemets, avait acquis le fief de Brécourt, réunissant ainsi en une même main les Seigneuries voisines de Douains et de Brécourt.
Lors du partage, vers 1540, de la riche succession Jubert, Michel Jubert eut Chailly avec Brécourt.
Henri Jubert, 2ème du nom, frère de Michel, lui succéda. Il fut le père
de Jean, conseiller au grand Conseil en 1609 et seigneur de Brécourt et Chailly.
Jean Jubert, en 1635, fit alors édifier l’actuel château de Brécourt.
En 1639, Jean Jubert obtint du seigneur de Rolleboise la réunion à Brécourt de la partie de fief qui s’étendait sur Brécourt moyennant 100 livres de rentes.
Vers 1652, Anne Jubert remplaça Jean, son père. Il épousa en premières noces Marie Varin et en secondes noces Marie d’Auxy. Son frère Louis eut après lui la terre de Brécourt. Il mourut vers 1680.
A la fin du 17ème siècle, la terre de Brécourt appartenait à Alphonse Jubert, membre de la branche aînée de la famille, seigneur de Bouville, président à la cour des aides de Rouen. Sans descendance, ce fut le marquis François de Monceaux, marquis d’Auxy qui hérita de Brécourt. Nous avons de lui un aveu, daté du 28 avril 1706.
Propriétaires successifs :,
Famille Guésdier de Saint Aubin,
Philippe Pottier,conseiller à la Cour des Aides de Normandie.
.La famille Jubert de Bouville racheta alors Brécourt, et Douains en 1764,
Nicolas-Louis Jubert Marquis de Bouville obtint l’érection de Brécourt en marquisat sous le nom de Bouville et mourut en 1770
Blason de la famille de Bouville ci contre.
Lors de la révolution, Mme de Bouville était dame de Brécourt, Saint-Vincent et Douains.
Le 26 novembre 1792, son fils Marie Alexandre Jubert de Bouville émigra en Allemagne et laissa à sa mère le soin de faire face aux difficultés. Son départ devait être guetté par les membres du district, puisque le 11 décembre 1792 le château fut décrété « Bien National » et l’inventaire réalisé immédiatement en présence du maire de la commune, Auguste Ducorté. On constate que les révolutionnaires étaient bien pressés d’en finir avec les biens du citoyen Bouville puisque la vente de tout ce que contenait le château de Brécourt eut lieu à partir du 3 janvier 1793. En plus des meubles, 187 bouteilles de vins furent vendues, pour une somme totale de 179 livres 10 sols, et les pièces de vin et de cidre le furent pour 155 livres. Il ne devait donc rester en cave qu’une centaine de bouteilles, si celles-ci n’avaient pas été bues ou emportées auparavant.
Le 13 juillet 1793. Une armée de fédérés, constituée de régiments divers, provenant de Caen souhaitent menacer l’approvisionnement de Paris en bloquant la vallée de la Seine. La journée est très chaude et les 3000 hommes, qui sont partis d’Evreux, s’installent pour bivouaquer aux abords du château de Brécourt. Leur chef, Joseph de Puisaye, est malade et il profite de cet arrêt pour retourner chez lui, tout près de là, au château de Menilles.
De son côté Humbert, commandant les troupes Jacobines venues de Paris et à Vernon, apprend que l’armée de Puisaye bivouaque à Brécourt. Le lendemain, à l’aube, avec 1200 hommes, il avance et fait donner son artillerie: « trois coups de canon éclatent et un boulet vient briser, au-dessus de la tête des fédéralistes, les branches d’un pommier. C’en fut assez pour décider du sort de la campagne. Bientôt l’infanterie, la cavalerie et l’artillerie se mêlant, se confondant, se bousculant, n’écoutent plus d’autre inspiration que celle d’une panique irrésistible et cherchent leur salut dans un sauve qui peut général.
La fuite tourne en déroute. Sauf un blessé, il n’y a eu aucune victime à ce « combat » connu localement sous le nom de « bataille sans larmes ». Elle est pourtant décisive, car elle sonne le glas des prétentions fédéralistes ».
Quelques auteurs ont prétendu que les fédérés, lors de leur arrivée a Brécourt, s’étaient empressés de piller les caves qui étaient pleines. Par cette chaude journée, ils se seraient laissés gagner par le sommeil et auraient ainsi été facilement surpris par les troupes de la Convention. Dans son article consacré au Fédéralisme dans l’Eure, Mr Pascal montre bien qu’il n’en est rien, et que seule « la statégie »est responsable de la défaite des fédérés. La vente du vin et du cidre est là pour conforter cette explication, à Brécourt le vin et le cidre ne coulèrent pas plus que le sang et les larmes
Mais la ferme du maire fut pillée
« Auguste Ducorté, cultivateur et maire de la commune de Brécourt, expose « le 13 Juillet 1793, jour à jamais mémorable dans les annales de la République, les rebelles (les
Fédérés) après s’être emparés du château, s’emparèrent aussi de ma maison, pillèrent tout le mobilier consommèrent tout ce que j’avais, s’emparèrent de mes bestiaux, etc…II ne m’était rien resté ; si mes parents et mes amis ne m’eussent assisté dans mon adversité, je serais réduit à la dernière misère… »
Suit la liste complète (48 articles) de tout ce qui fut dérobé chez le plaignant
: 12 douzaines de chemises… des habillements de femmes…
30 livres de chandelle…les écharpes du maire et de l’adjoint.300 pièces de volaille, sans oublier 3 pièces de vin, 30 muids de cidre et 10 pots d’eau de vie
Le 16 fructidor an 7 (2 septembre 1799), le château de Brécourt fut vendu, comme « Bien National », à Charles Felice, entrepreneur de l’habillement des armées.
Puis en 1802 il fut acquis par Dominique Catherine marquis de Perignon (1756-1818) Maréchal d’Empire et resta dans cette famille jusqu’en 1903, on lui doit le mécanisme de l’horloge du village toujours en fonctionnement.
A partir de cette date, de nombreux propriétaires vont se succéder et tous ne respecteront pas cette auguste demeure :
1903 Acquisition par Mr FEL.
1916 Mr FERRAND
1923 Mr GADE , capitaine de frégate (américain)
1930 Mr ARMOUR, ambassadeur des U.S.A.
1939 Mme STRAUSS Von HABAN
Pendant la dernière guerre, l’édifice fut occupé épisodiquement par les allemands
1951 Mr TEXIER
1952 Mr LEVILLAIN, exploitant forestier, dépeça le parc ; il était peu soucieux de la beauté des lieux il n’a pas habité le château il est toujours propriétaire de l’allée face au château.il serait âgé de 103 ans.
1954 Mr POULLE, il s’attacha à redonner vie au château, il n’a pas eu les moyens de sauver la chapelle qui n’avait déjà plus de couverture.
1979 le château fut transformé en hôtel. De grandes restaurations furent entreprises, qui ne dénaturèrent en rien ce bel édifice
Il est actuellement à vendre, il est estimé à 4 200 000 €, une tourelle est fissurée et risque de s’effondrer.
Annexe : lettre de Mme de Bouville à M. Ducernay